Germain Katanga & Mathieu Ngudjolo Chui in court
qui sommes Germain Katanga &
Mathieu Ngudjolo Chui?

Par Sheila Vélez

Nous vous présentons la Chronique Katanga et Ngudjolo #6, qui à l’origine a été publiée sur le site web d’Aegis Trust. Les vues et opinions exprimées ici ne reflètent pas nécessairement les vues et opinions d’Open Society Justice Initiative.

Le troisième témoin à charge continue son témoignage. L’ancien soldat du Front des Nationalistes et intégrationnistes (FNI) a déjà dit au tribunal que la milice Lendu était un groupe hiérarchisé commandé par Mathieu Ngudgolo. Selon lui, le FNI était organisé en camps dans le groupement Ezekere et Zumbe servait de centre de commandement à Ngudjolo.

Quand il était dans les rangs du FNI, le témoin 250 a pris part à l’attaque de février 2003 contre le village de Bogoro. L’agression aurait été planifiée à Aveba, à 50 km au sud de Bunia et siège du FRPI. Katanga y aurait rencontré une délégation du FNI en janvier 2003. Le témoin 250 était également présent. A cette époque, il était garde du corps du commandant BobaBoba. BobaBoba a assisté à la réunion au nom de Ngudjolo, et le témoignage du témoin 250 devrait donc donner un aperçu des éléments clés de l’argumentation de l’Accusation : la planification de l’attaque, l’attaque elle-même et la structure de commandement de la milice.

Selon la déposition du témoin, la réunion a eu lieu à Aveba et avait pour objectif de trouver une « solution » au « problème de Bogoro ». La présence de l’UPC / Hema dans le village a été considérée comme un obstacle à la communication et au libre passage entre les Lendu au nord de Bogoro et les Ngiti au sud de la ville. Il leur fallait « se libérer de l’esclavage » et « chasser les gens qui occupaient Bogoro », « couper la tête du serpent ». Après avoir rencontré Germain Katanga à Aveba, la délégation est retournée à Zumbe avec sa « solution » – un plan détaillant la façon de mener une attaque contre Bogoro. Germain Katanga allait fournir toutes les munitions dont les combattants Lendu avaient besoin.

Selon diverses déclarations de témoins, il existe des lettres qui donnent tous détails du plan. Il y en a une en particulier qui semble confirmer le récit du témoin 250. M. MacDonald annonce qu’il veut montrer un document au témoin. Il s’agit d’un document daté du 4 janvier 2003, écrit et signé par deux membres du FNI Lendu : Bukpa KALONGO et Martin BANGA, tous deux membres de la délégation qui a été envoyée à Aveba. Sous le titre ‘Demande d’aide’, la lettre était adressée à l’« Opérateur OUDO » à Olongba, avec ampliation au colonel Cobra Matata, un proche collaborateur de Germain Katanga.

« Et le timbre entre les noms, pouvez-vous le reconnaître? » demande M. MacDonald. Le sceau contient les mots suivants: Bureau d’État Major Tatsi / Zumbe. « Oui, je le reconnais », répond le témoin. C’est le cachet du FRPI. Tatsi et Zumbe sont respectivement une Collectivité et un village, dans le groupement Ezekere. Dans la lettre, les délégués du FNI informent M. OUDO qu’ils sont à Aveba depuis 3 semaines et se proposent d’envoyer une petite délégation à Olongba pour se procurer du savon. Selon le témoin 250, il était impossible de distinguer le FNI du FRPI en ces temps-là et c’est seulement après la bataille de Bogoro que des noms différents ont été utilisés.

« Monsieur le témoin, avez-vous vu ce document avant votre comparution devant ce tribunal? » demande M. MacDonald. « Je sais que cette lettre existait mais elle était en la possession d’officiers de haut rang », répond le témoin.

L’équipe de défense de Katanga intervient de façon inattendue. M. Hopper est préoccupé par le fait que le témoin a mis en doute l’authenticité du document. Mais il a mal compris la traduction. « Est-ce que cette lettre est authentique? » demande M. Hooper. « Je ne sais pas si le document est original. Je pense que c’est une question à étudier. » M. MacDonald ne cache pas son irritation. Il se lève pour s’adresser à la Chambre, mais se ravise et se rassied, nerveusement.

Le témoin 250 parle en swahili. Son témoignage est traduit en français d’abord, puis en anglais. Les fonctionnaires de la cour vérifient les transcriptions pour essayer de trouver ce à quoi M. Hooper fait allusion. Seules quelques personnes dans la salle écoutent la cabine swahilie, M. Germain Katanga est l’un d’eux. Tout le monde est perdu dans la traduction.

Après la séance de la mi-matinée, l’Accusation a pris une dernière décision stratégique. M. MacDonald présente un nouveau document : une décision orale prise par les juges du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Sur la base de cette décision, l’Accusation demande à la Chambre l’autorisation de retourner aux déclarations précédentes du témoin, afin de lui rafraîchir la mémoire. Dans des circonstances normales, la déposition du témoin doit être fondée sur ce dont il peut se souvenir. Mais M. MacDonald veut explorer certains domaines de manière plus détaillée. Il veut en savoir plus sur les chansons de haine fondées sur l’appartenance ethnique et chantées par les combattants ; comment la « solution » a été trouvée à Aveba, comment des munitions ont été obtenues et distribuées, et comment les enfants soldats en sont arrivés à entrer dans les rangs du FNI et du FRPI. L’Accusation doit prouver que Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo se sont intentionnellement entendus sur un plan visant à « effacer » Bogoro et qu’ils ont été directement responsables de sa mise en œuvre. Cela comprend l’émission d’ordres, l’obtention et la distribution d’armes et de munitions et l’encouragement des soldats sous leur commandement.


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