Les juges d’appel de la Cour pénale internationale (CPI) ont confirmé l’ordonnance de réparation émise l’année dernière à l’encontre de l’ancien chef rebelle congolais Germain Katanga, comprenant le million de dollars US qu’il a été condamné à payer aux victimes de ses crimes.
Dans la décision émise le 8 mars, les juges d’appel ont également ordonné à la Chambre de première instance, qui a émis l’ordonnance de réparation, d’évaluer rapidement les cinq demandes de réparations qu’elle avait rejeté. Les juges de première instance avaient conclu plus tôt qu’ils n’étaient pas en mesure de déterminer un lien de causalité entre le traumatisme subi par les cinq demandeurs et l’attaque de 2003 de la ville congolaise de Bogoro pour laquelle M. Katanga a été condamné.
Les cinq victimes sont nées après l’attaque de Bogoro mais elles demandent des réparations soutenant qu’un « préjudice transgénérationnel » s’était transféré de leurs parents, qui avaient subi des traumatismes découlant des crimes commis à Bogoro, sur leurs propres personnes. Les juges d’appel ont ordonné que ces demandes soient de nouveau évaluées car elles sont peu nombreuses et que la Chambre de première instance avait déjà établi que les demandeurs avaient subi des préjudices psychologiques qui étaient « selon toute vraisemblance » transgénérationnel.
Katanga, un ancien dirigeant de la Force de Résistance Patriotique en Ituri, une milice armée, a été condamné en mars 2014 en tant que complice de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité découlant de l’attaque sur les civils. Il a été condamné à 12 ans de prison.
L’année dernière, les juges ont ordonné des ordonnances accordant réparation pour 297 victimes, totalisant 1 million de dollars US. M. Katanga a toutefois fait appel, affirmant qu’il n’avait pas la capacité de payer et que le montant ne reflétait pas équitablement le rôle qu’il avait joué dans les crimes pour lesquels il a été condamné.
Dans une décision unanime, les juges ont fait remarquer que l’objet des réparations était de réparer le préjudice infligé aux victimes. Par conséquent, si d’autres personnes avaient contribué aux préjudices causés par les crimes pour lesquels une personne a été condamnée, ce point est sans rapport avec la responsabilité de cette personne condamnée à réparer ces préjudices. « Bien qu’une ordonnance de réparation ne peut excéder le coût total de réparation des préjudices subis, il n’est pas inapproprié, en soi, de tenir la personne responsable du montant total nécessaire pour réparer le préjudice », ont décidé les juges.
Les juges ont cité le jugement d’appel relatif aux réparations de Thomas Lubanga, qui détermine que la responsabilité d’une personne condamnée pour les réparations doit être proportionnelle au préjudice causé et à sa participation dans la commission des crimes. Les juges ont ajouté que, toutefois, cela ne signifiait pas que le montant des réparations qu’une personne condamnée doit assumer devait refléter la responsabilité pour les préjudices envers des tiers qui ont contribué à ces préjudices.
Les juges ont rejeté l’argument de M. Katanga selon lequel il faisait face à une double peine en raison de l’importance de la réparation retenue à son encontre. Ils ont affirmé que, tant qu’une personne condamnée est tenue responsable des coûts nécessaires pour réparer le préjudice subi, il n’y a pas d’élément punitif. « Le fait que ce montant est élevé est simplement le résultat de l’étendue des préjudices causés par les crimes pour lesquels la personne a été condamnée », a ajouté le juge.
Les juges d’appel étaient cependant en désaccord avec la décision de la Chambre de première instance d’évaluer chaque demande de réparations qui, selon eux, n’était pas l’approche la plus appropriée. Ils ont également déclaré que cette approche était « chronophage, … demandait des ressources importantes » et entraînait des retards inutiles dans l’octroi des réparations. De plus, la valeur déterminée pour la responsabilité de M. Katanga était sans rapport avec les projets de réparation proposés par le Fonds au profit des victimes (FPV).
La Chambre d’appel a déterminé que la définition de « victimes » donnait droit à des réparations en vertu de l’article 75 du Statut, qu’elles soient directes ou indirectes, n ‘était pas restreinte à une classe de personnes. De même,, les juges ont souligné que la définition de victimes en vertu de la règle 85(a) du Règlement de procédure et de preuve souligne la condition relative à l’existence d’un préjudice plutôt que le fait de savoir si la victime indirecte était un membre proche ou éloigné de la famille de la victime directe.